Financer les investissements colossaux du projet interbancaire européen
En mars 2015, l’UE a adopté le règlement « relatif aux commissions d’interchange pour les opérations de paiement liées à une carte » ou IFR (Interchange Fee Regulation) afin d’encadrer les marchés des services de paiement et de permettre une concurrence loyale à l’échelle de l’Union. Le plafonnement des commissions d’interchange, qui constituent une part des frais payés par les commerçants à leur banque lors de la réception d’un paiement par carte, faisait partie des principaux leviers proposés. L’objectif était clair : plafonner le niveau de ces commissions au bénéfice des consommateurs finaux.
5 ans plus tard, une étude commandée par le réseau de paiement MasterCard au cabinet Edgar, Dunn & Company montre que la mise en application de ce règlement européen a effectivement permis de réduire les commissions interchange réglées par les commerçants, de l’ordre de 5,14 milliards d’euros par an à l’échelle de l’UE. Rien n’indique toutefois que les commerçants aient répercuté cette baisse sur le prix de vente, précise l’étude.
Suite à la présentation d’une étude de suivi au Parlement européen concluant que les objectifs étaient atteints, la Commission a estimé qu’il n’était pas nécessaire « d’entamer une proposition législative de révision du règlement ». Autrement dit, l’institution de l’Union européenne refuse d’abaisser à nouveau les plafonds des commissions interchange comme le demandaient plusieurs lobbies de consommateurs et de distributeurs. Il s’agit selon elle d’une condition essentielle pour convaincre les banques de se lancer dans le projet EPI qui nécessite des investissements conséquents.
Des conséquences pour les émetteurs de cartes européens
Si la décision prise par la Commission européenne devrait sécuriser près de 7 milliards d’euros de revenus par an pour les banques et leur permettre de déployer leur projet d’infrastructure, elle aura de lourdes conséquences pour les émetteurs de cartes européens. Comme le montre l’étude réalisée par le cabinet Edgar, Dunn & Company, leur manque à gagner est évalué à 5,14 milliards d’euros en 2018 par rapport à 2014 alors que les transactions sur cette période ont explosé de 750 milliards d’euros (+35 %).
Les effets du plafonnement des commissions interchange restent aujourd’hui difficiles à mesurer. En effet, seules les enseignes de la grande distribution enregistrant de gros volumes de paiement semblent avoir pu en tirer profit. Pour les petits commerçants comme les consommateurs, ce plafonnement n’aurait cependant pas changé grand-chose.