Un choix politique
L’inflation est de retour depuis le début de l’année, et a atteint au mois de mai l’objectif de 2 % que la Banque centrale européenne s’était fixé. En France, elle est de 1,4 %, mais risque de grimper encore dans les mois à venir. Le phénomène était attendu, mais les économistes l’envisageaient plutôt pour la fin de l’année.
Actuellement, le taux du Livret est de 0,5 %. Concrètement, les sommes placées sur les Livrets A perdent de la valeur, car la différence entre le taux d’inflation et le taux du produit d’épargne préféré des Français ne permet pas d’obtenir un rendement réel positif. Au mois de juin, le taux de rendement réel du Livret A est estimé à - 0,8 %.
Pourtant, depuis le début de la crise sanitaire, le Livret A enregistre des records de collecte, les Français appréciant sa souplesse et la possibilité de déposer ou retirer leur épargne au gré de leurs besoins.
Depuis l’année dernière, le taux de rémunération du Livret A est soumis à une nouvelle formule de calcul : il ne tient qu’en partie compte de l’inflation, car il est calculé à partir de la moyenne semestrielle du taux d’inflation et des taux des titres interbancaires.
La Banque de France détermine ce taux deux fois par an, en janvier et en juillet. Toutefois, la décision de le réviser revient entièrement au ministère de l’Économie. En pleine période électorale, il s’agit d’un choix politique qui, étant donné l’attrait des Français pour ce produit d’épargne, n’est pas sans incidence.
Encourager la consommation ou augmenter la rémunération du Livret A ?
Actuellement, le taux des titres interbancaires est négatif, à 0,54 %. Par conséquent, pour que le taux de rémunération du Livret A soit révisé, compte tenu de la nouvelle formule de calcul, la moyenne de l’inflation des 6 mois passés doit être supérieure à 1,5 %.
Si ce seuil n’est pas encore atteint, l’inflation ayant évolué de 0,6 % à 1,4 % entre janvier et mai, la question devrait néanmoins se poser rapidement, probablement à partir du mois de janvier 2022.
Le gouvernement sera alors confronté à deux choix : ne pas toucher au taux de rémunération du Livret A, ou décider de le réviser. Dans le premier cas, la décision serait cohérente avec la volonté du gouvernement d’encourager la consommation, après plus d’un an d’épargne record des ménages français. Par ailleurs, le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire avait déclaré, lorsqu’il a décidé d’abaisser le taux à 0,5 %, que le Livret A n’était plus destiné à mettre les ménages à l’abri de l’inflation.
Mais en faisant ce choix, le gouvernement s’expose également à la colère des Français, qui sont très attachés à ce produit d’épargne. D’après l’association de consommateurs CLCV (Consommation Logement Cadre de Vie), l’intégration des titres interbancaires à la nouvelle formule de calcul de la rémunération du Livret A n’est pas cohérente et s’oppose à l’idée même d’épargne populaire.
Reste que l’inflation, selon certains économistes, ne va pas nécessairement s’accélérer durant les prochains mois, et pourrait progressivement se lisser, notamment avec la normalisation du prix des matières premières.