Les autorités européennes et américaines s’apprêtent à suivre la manière dont seront appliqués les critères ESG (Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance) par le secteur financier. Elles redoutent notamment le risque de greenwashing, c’est-à-dire un verdissement de façade de la finance sans réel impact sur la transition énergétique. La BCE notamment alerte sur les risques et dérives de la finance verte censée faciliter cette transition.
Une sous-estimation du risque lié à la transition énergétique
Dans son rapport sur les risques liés au climat pour la stabilité financière, la BCE s’est penchée sur le « greenium » qui correspond à une prime accordée aux entreprises émettrices d’une obligation verte leur permettant de bénéficier de meilleures conditions de financement que pour une obligation classique. Si aujourd’hui, cet argument est de plus en plus mis en avant pour investir dans les green bonds, l’institution rappelle que seules les obligations soumises à un examen interne peuvent présenter un greenium. L’absence de cadre en la matière et les exigences variables sur l’utilisation des fonds ouvrent la porte à des exagérations sur les bénéfices environnementaux des projets.
Cela pourrait conduire à « une sous-estimation du risque lié à la transition et à un mouvement de vente massive de green bonds », précise la banque centrale.
Autre point évoqué : le manque de labels. Dans son étude, la BCE révèle que seuls 20 % des fonds ESG sont reconnus comme tels par les trois principales agences spécialisées dans ce domaine.
Robert Ophèle, le président de l’Autorité des marchés financiers (AMF), a récemment insisté sur la nécessité de « pouvoir s’appuyer sur un corpus de standards minimaux » établis à l’échelle européenne pour « éviter un greenwashing qui serait à tous les égard très désastreux ».
Un renforcement des normes réglementaires sur le greenwashing
Face à la menace de greenwashing, la SEC (Security and exchange commission) prépare de nouvelles normes sur les données devant être communiquées par les fonds d’investissement dont la dénomination comporte des termes tels que « durable », « ESG » ou encore « bas carbone ». L’objectif : contraindre les entreprises à dévoiler la manière dont sont intégrés les critères ESG dans leur politique d’investissement. En attendant, la SEC multiplie les avertissements à l’égard du secteur financier. Le 23 mai dernier, le régulateur a infligé une amende de 1,5 million de dollars à la banque BNW Mellon pour avoir fait des déclarations inexactes à des clients sur les critères ESG de leurs investissements.
De son côté, la BCE s’interroge sur la véracité de la communication des entreprises sur leurs politiques climatiques considérant que leurs objectifs de réduction de CO2 ou leur alignement avec l’Accord de Paris sont parfois difficiles à évaluer. La banque centrale appelle à l’encadrement et à l’uniformisation des standards verts.
La mise en œuvre de normes cohérentes pour les instruments financiers durables semble désormais incontournable pour les autorités américaines et européennes.