Dans un arrêt du 24 avril, la Cour de cassation retient pour la première fois qu’un salarié peut contester son licenciement pour inaptitude au travail en invoquant l'imprescriptibilité des manquements de son employeur à son obligation de sécurité, bien que ceux-ci soient légalement prescrits.
Des manquements de l’employeur à son obligation de sécurité
En l’espèce, une personne avait été engagée en qualité de « merchandiser » par une société de cosmétique. Deux ans après sa prise de poste, celle-ci avait été déclarée inapte à l’issue de deux visites de reprise. Suite à cette déclaration, l’employeur avait décidé de procéder à son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Contestant cette décision, la salariée avait saisi la juridiction prud’homale de demandes liées à l’exécution et à la rupture de son contrat de travail.
Le conseil de prud’hommes n’a pas donné raison à la salariée, estimant que le délai de prescription de l’action en contestation d’un licenciement court à compter de la notification de celui-ci. Or, la salariée soutenait que son licenciement pour inaptitude résultait directement du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, des faits qui sont prescrits depuis le 20 février 2015 alors qu’il a été licencié par lettre du 23 décembre 2015.
Devant la cour d’appel, la salariée a été déboutée de sa demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au motif que les faits constitutifs du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité sont prescrits.
Insatisfaite des deux décisions rendues, la salariée a formé un pourvoi en cassation.
Une contestation du licenciement pour inaptitude possible sans délai
Dans un arrêt du 24 avril 2024, la Cour de cassation casse et annule la décision d’appel indiquant que la prescription des faits invoqués n’empêche pas la recevabilité d’une action en contestation d’un licenciement pour inaptitude.
D’abord, la chambre sociale de la Cour de cassation rappelle que l’employeur est tenu de veiller à la santé et à la sécurité des travailleurs en mettant en place des actions de prévention, d’information et de formation. Il doit aussi évaluer les risques professionnels sur chaque poste de travail qui sont consignés dans un document. En cas de non-respect de ces obligations, sa responsabilité civile et/ou pénale peut être engagée.
Ensuite, elle précise que le licenciement est « dépourvu de cause réelle et sérieuse » lorsque l’inaptitude du salarié est liée à un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
Puis, elle affirme qu’un salarié agissant dans le délai imparti pour contester son licenciement pour inaptitude peut invoquer, sans délai, que celui-ci est la conséquence d’un manquement de l’employeur à ses obligations. De cette manière, la haute juridiction considère que la question de la prescription des faits invoqués n’a pas d’importance dès lors que l’action en contestation du licenciement a été introduite dans le délai de 2 ans à compter de la notification de la rupture du contrat de travail.