La communication des banques centrales au service de la politique monétaire

Si les banques centrales ont longtemps pris leurs décisions de politique monétaire dans l’ombre, tenant à l’écart les marchés financiers et le grand public, leur stratégie de communication a considérablement évolué. Elles optent désormais pour la transparence, conscientes de leur influence sur les décisions économiques des investisseurs et des ménages.

Influencer les décisions des acteurs économiques

« Si vous trouvez que je suis clair, c’est que vous m’avez probablement mal compris », déclarait en 1988 Alan Greenspan, alors gouverneur de la Réserve fédérale américaine.

A cette époque, les banques centrales laissaient volontairement planer un certain mystère autour de leurs décisions de politique monétaire, pour mieux surprendre les marchés financiers.

Pendant longtemps, la Banque centrale européenne a refusé de communiquer sur les évolutions futures de sa politique monétaire. J.-C. Trichet, président de la BCE de 2003 à 2011, puis son successeur Mario Draghi en début de mandat, ont incarné cette stratégie de non-communication en répétant à plusieurs reprises la phrase :

« Nous ne nous engageons jamais sur l’avenir ».

La crise financière de 2008 va venir changer la donne et introduire le principe de « forward guidance », ou « guidage prospectif ». Dans un contexte très incertain, marqué par des taux directeurs quasi nuls voire négatifs, les banques centrales décident de lever le voile sur leurs décisions de politique monétaire.

En communiquant auprès des investisseurs et des ménages, les banques centrales cherchent désormais à « influencer les anticipations de taux d’intérêt des acteurs économiques », comme l’explique la Banque de France.

Concrètement, une banque centrale cherchant à tirer les prix à la hausse pour éviter la déflation annoncera que ses taux directeurs resteront bas, amenant ainsi les banques commerciales à prêter à taux bas, ce qui incitera les entreprises à investir et boostera la consommation des ménages. Résultat : sous l’effet de la demande croissante, les prix vont bel et bien finir par grimper.

Gagner la confiance du grand public

Aujourd’hui, le contexte inflationniste amène les banques centrales à rechercher l’effet inverse. En communiquant sur leurs décisions de politique monétaire, elles entendent persuader les acteurs économiques que l’inflation est temporaire, évitant ainsi que les entreprises fassent davantage grimper les prix ou revoient trop à la hausse les salaires.

Toutefois, si les marchés financiers sont très réceptifs aux annonces des banques centrales, c’est moins le cas des entreprises et des ménages.

« L’intérêt limité des ménages et des entreprises à l’égard des informations concernant la politique monétaire et l’inflation constitue un défi majeur pour les banques centrales », explique Bloc-notes Eco, le blog de la Banque de France.

Par conséquent, de nombreux efforts sont déployés par l’institution pour attirer l’attention de ce public. Elle a notamment lancé son propre podcast « On parle cash », qui décrypte les grands sujets économiques et se décline en deux formats : l’un est destiné au grand public, l’autre à une audience d’experts. La Banque de France poste également des vidéos pédagogiques sur les réseaux sociaux.

 

 

De son côté, la Banque centrale européenne met aussi l’accent sur la communication. Toutes ses décisions de politique monétaire sont décodées, traduites en 24 langues et mises en accès libre sur son site Internet. Le portail « La BCE à votre écoute » est présenté comme une interface de communication entre l’institution et le grand public, et un podcast a également été lancé.

La communication est aussi utilisée par les banques centrales comme un moyen de gagner la confiance du grand public, et de prouver l’indépendance de leurs décisions de politique monétaire.