Le partage de la valeur entre les salariés et l’entreprise, au moyen de dispositifs comme l’intéressement ou la participation, est considéré par le gouvernement comme un levier d’augmentation du pouvoir d’achat. Les PME-TPE, qui s’emparent peu des outils existants, vont être incitées à jouer davantage le jeu.
Une négociation interprofessionnelle en cours
Le 8 novembre 2022, une négociation interprofessionnelle consacrée à la question du partage de la valeur créée en entreprise a été ouverte. Conformément à l’article L1 du Code du travail, les partenaires sociaux ont été saisis par le gouvernement pour aborder plusieurs axes de réflexion et se mettre d’accord sur différents dispositifs.
Selon le cahier des charges, il est notamment prévu pour les organisations syndicales et patronales de réfléchir à la généralisation du « bénéfice des dispositifs de partage de la valeur pour les salariés, notamment des plus petites entreprises », mais aussi à la modernisation de la formule de participation et à l’orientation de l’épargne salariale « vers les grandes priorités d'intérêt commun », comme la transition écologique.
Ces discussions, qui s’achèveront fin janvier, ont en partie pour objectif d’inciter les PME-TPE à s’intéresser davantage aux dispositifs de partage de valeur en entreprise. Lors de ses vœux aux acteurs économiques le 5 janvier, le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire a par ailleurs annoncé la tenue d’une convention sur le sujet en février.
« Quand une entreprise a les moyens de verser des dividendes, elle doit en faire bénéficier ses salariés. Nous travaillerons sur des propositions concrètes, dans le prolongement de ce qui a été fait depuis près de six ans sur l’intéressement, la participation et l’actionnariat salarié », a-t-il déclaré.
Des dispositifs simplifiés pour les PME-TPE
Actuellement, 52,8 % des salariés bénéficie d’un ou plusieurs dispositifs de partage de la valeur, mais les différences entre les entreprises sont très marquées. 88,5 % des entreprises de plus de 1000 salariés ont mis en place au moins un dispositif de partage de la valeur, contre à peine 20 % des entreprises de moins de 50 salariés.
Seul un salarié sur 10 d’une entreprise de cette taille bénéficie d’une prime d’intéressement, dont le montant est proportionnel aux résultats de l’entreprise, et 6 % d’entre elles ont mis en place un dispositif de participation aux bénéfices, qui n’est obligatoire que pour les entreprises de plus de 50 salariés.
Pourtant, la loi PACTE de 2019 et la loi en faveur du pouvoir d’achat de 2022 ont simplifié ces outils pour les rendre accessibles aux TPE-PME. Le 1er janvier 2019, le forfait social de 20 % appliqué aux sommes versées par les employeurs au titre de l’épargne salariale a été supprimé, sur l’intéressement pour les entreprises de moins de 250 salariés, et sur la participation et l’abondement pour les entreprises de moins de 50 salariés.
La loi en faveur du pouvoir d’achat a aussi contribué à simplifier le dispositif de l’intéressement. Il peut désormais être mis en place unilatéralement par les dirigeants d’entreprises de moins de 50 salariés, pour une durée rallongée de 3 à 5 ans, renouvelable par tacite reconduction. Les contrôles ont également été allégés.
Ces mesures ont levé un certain nombre de freins : en juin 2022, 367 000 entreprises – parmi lesquelles 90 % de PME – ont mis en place un dispositif d’épargne salariale, contre 348 000 un an plus tôt, soit une hausse de 5,6 %. Cette hausse s’élevait à 6,1 % dans les seules entreprises de moins de 50 salariés.
La question du dividende salarié
Le gouvernement estime toutefois que l’intérêt des PME-TPE pour les dispositifs de partage de la valeur en entreprise reste trop limité. Pour faire évoluer les choses, il mise en partie sur la pédagogie, notamment via un accompagnement par les experts-comptables.
La conjoncture actuelle, marquée par l'inflation et une forte attente des salariés concernant l’amélioration de leur pouvoir d’achat, pourrait également jouer en faveur de ces dispositifs, qui offrent une alternative à l’augmentation des salaires. D’autant que les entreprises peinent à recruter et à fidéliser leurs salariés, et pourraient ainsi actionner des leviers pour se démarquer de la concurrence.
Mais si la pédagogie et les mesures incitatives sont encore à l’ordre du jour, le gouvernement ne semble plus écarter la possibilité de mettre en place des mesures contraignantes pour accélérer le déploiement de ces dispositifs. Le dividende salarié, qui figurait au programme d’Emmanuel Macron, refait surface : il imposerait aux entreprises versant des dividendes à leurs actionnaires de faire de même pour leurs salariés. Toutes les entreprises seraient concernées, mais pas au même niveau.
La majorité des chefs d’entreprises est toutefois opposée à la mise en place du dividende salarié, y compris parmi les dirigeants de PME-TPE. Selon une enquête réalisée mi-novembre par la CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises), 7 adhérents sur 10 y étaient opposés. Les syndicats eux-mêmes ne sont pas tous convaincus, à l’instar de la CGT qui y voit un moyen de contourner les augmentations de salaire.
#Video 📽️ | Difficultés de recrutement, augmentation de salaires, partage de la valeur : où en sont les #TPE #PME ?
— CPME (@CPMEnationale) November 25, 2022
🔎 @CheveeEric décrypte les résultats de la dernière enquête #CPME en 1min30.
👉 Télécharger l’enquête : https://t.co/5BqvB3gRtC pic.twitter.com/TfkEh4watW