Le Conseil d’État est intervenu récemment, dans le cadre d’un contentieux concernant le droit de contrôle de l'administration fiscale, sur les déficits reportables non imputés relatifs à des exercices prescrits par les services fiscaux.
Les faits
Dans cette affaire, une société ayant pour activité la fabrication et le négoce de briquets, d’instruments à écrire et d’accessoires avait été soumise à un contrôle comptable au titre de ses exercices clos de 2008 à 2011. Dans ses conclusions, l’administration fiscale avait estimé que les prix auxquels elle vendait ses produits à sa filiale établie à Hong-kong caractérisaient un transfert de bénéfices à l’étranger. Elle a donc rectifié les déficits déclarés par l’entreprise au titre de ces exercices et remis en cause les résultats déficitaires enregistrés au titre des exercices antérieurs au premier exercice non prescrit.
En première instance, le tribunal administratif a déclaré que l’administration pouvait à juste titre procéder à ces vérifications. Contestant cette décision, la société a fait appel, mais la cour ne lui a pas donné raison. Les juges ont considéré que les déficits reportables influent nécessairement sur les résultats servant de base au calcul de l’impôt dans la mesure où les déficits issus des exercices antérieurs ont pour effet d'accroître le déficit des exercices non prescrits. L’entreprise a donc formé un pourvoi en cassation.
L’administration peut contrôler les déficits reportables issus d’exercices prescrits
Le Conseil d’État a été amené à trancher sur la question suivante : le fisc peut-il procéder au contrôle des déficits reportables non imputés relatifs à des exercices prescrits ?
Selon la jurisprudence, l’administration est en droit, lors de la vérification de comptabilité d’un exercice non prescrit, de contrôler les déficits résultant d’exercices prescrits ayant fait l’objet d’une imputation au titre d’un exercice non prescrit et de remettre en cause son montant dès lors que ceux-ci ont une incidence sur le résultat de l’exercice non prescrit concerné. Le Conseil d’État, par un arrêt du 5 juillet 2023, a confirmé cette analyse en estimant que l’administration peut exercer son pouvoir de contrôle et de rectification sur l’existence et le montant du déficit en report issu d’exercices antérieurs même prescrits.
Ainsi, le pourvoi formé par la société a été rejeté et l’administration fiscale jugée apte à contrôler les déficits reportables non imputés relatifs aux exercices clos de 2008 à 2011.
Dans ce cadre, le Conseil d’État précise toutefois que le contribuable garde la possibilité de contester la réduction du montant du déficit reportable par l’administration fiscale, conformément aux dispositions de l’article L 190 du Livre des procédures fiscales.