Plusieurs ONG de défense de l’environnement ont pris connaissance, via le terminal Bloomberg, un système logiciel fournissant de nombreuses données financières en temps réel, d’un prêt général d’un montant de 8 milliards de dollars accordé à TotalEnergies par 12 banques, dont 3 banques françaises. Elles dénoncent ce prêt qui pourrait servir à financer EACOP (East African Crude Oil Pipeline), un projet pétrolier très controversé. Décryptage.
Le prêt le plus important accordé à TotalEnergies depuis l’Accord de Paris
Les ONG de défense de l’environnement, parmi lesquelles l’ONG Reclaim Finance, accusent plusieurs banques d’accorder un prêt général (« Revolving Credit Facilities ») de 8 milliards de dollars à TotalEnergies, signant ainsi selon elles un chèque en blanc au groupe pétrolier.
Ce financement, qui est selon les ONG le plus important depuis la signature de l’Accord de Paris, a été accordé par 12 banques qui sont toutes membres de la Net Zero Banking Alliance, une alliance fondée en 2021 en faveur de la neutralité carbone.
Parmi ces banques, 3 banques françaises ont joué « un rôle moteur », d’après le communiqué de presse de l’ONG Reclaim Finance, dans « la structuration, la coordination et la syndication du prêt ». Il s’agit de BNP Paribas, Société Générale et Crédit Agricole, qui avaient pourtant annoncé en avril 2021 qu’elles ne financeraient pas le projet pétrolier EACOP porté par TotalEnergies en Ouganda.
Pourtant, ce prêt général n’est pas affecté à un projet spécifique, et « servira à financer l’intégralité des opérations de l’entreprise, y compris le déploiement de nouveaux projets pétro-gaziers », parmi lesquels EACOP, alerte Reclaim Finance.
Les ONG dénoncent l’absence de contreparties
La banque française Natixis figure également parmi les signataires de ce prêt, aux côtés de Standard Chartered PLC, RBC Dexia Investor Services Bank, Mizuho Bank Ltd/Paris, JP Morgan, Deutsche Bank France, Barclays, Santander et Banco Bilbao Vizcaya Argentaria.
« Cette opération s’est déroulée quelques jours à peine après la publication du troisième chapitre du rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) qui rappelle que la fenêtre d’action pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C devient très étroite », regrette Reclaim Finance, qui signale que TotalEnergies « aura consommé la totalité de son budget carbone 1,5° d’ici 2035 au plus tard ».
Interrogés par le quotidien Les Echos, ni TotalEnergies ni les banques Crédit Agricole, BNP Paribas et Société Générale n’ont souhaité faire de commentaire. Une source bancaire a affirmé au quotidien qu’il s’agissait d’un prêt d’un an visant à « répondre aux besoins de liquidités du groupe dans le contexte détérioré du marché obligataire ».
Pour les ONG de défense de l’environnement, le cœur du problème est l’absence de conditions et de contreparties en échange de ce prêt, accordé à un groupe dont 70 % des dépenses d’investissement sont consacrées aux énergies fossiles.
L’ONG Reclaim Finance, de même que Greenpeace, Oxfam, les Amis de la Terre et plusieurs autres ONG ont appelé, le 4 mai, les actionnaires « à prendre en compte l’urgence climatique dans leurs votes lors de l’Assemblée générale de TotalEnergies », qui aura lieu le 25 mai prochain.
Elles demandent aux actionnaires de « cesser tout nouveau soutien financier à TotalEnergies aussi longtemps que la société ne se sera pas engagée à cesser le développement de nouveaux projets pétroliers et gaziers, condition sine qua non pour limiter le réchauffement à 1,5°C d’après l’Agence internationale de l’énergie ».