Peut-on mettre l'immeuble d'une SCI à disposition d’un associé gratuitement ?

Un gérant de SCI peut-il mettre gratuitement un immeuble à disposition d'un associé ? La Cour de cassation vient de trancher. Si les statuts de la SCI ne prévoient pas explicitement cette possibilité, le gérant ne peut pas prendre cette décision seul. C'est ce que la Cour a confirmé dans un arrêt rendu le 2 mai.

Une SCI constituée entre époux

En l’espèce, une société civile immobilière avait été constituée entre deux époux. Mme disposait de 99 parts et M. d’une part. La société était propriétaire d’un immeuble de deux étages, dont le rez-de-chaussée était loué depuis 2002 à une entreprise dirigée par l’époux. En 2013, suite à la séparation du couple, la SCI a consenti à ce dernier un prêt à usage portant sur les deux étages de l’immeuble. En 2014, lors d’une assemblée générale extraordinaire organisée par un mandataire désigné judiciairement, il a été décidé de révoquer M. de ses fonctions de gérant et de nommer Mme à la place.

L’époux a assigné la SCI en remboursement de son compte courant d’associé SCI. La société a formé des demandes reconventionnelles, notamment pour annuler la convention de prêt à usage conclue en 2013.

En appel, l’ex-épouse a obtenu gain de cause. En effet, selon la cour d’appel, le fait que les statuts d’une SCI n’indiquent pas dans l’objet social la faculté de mettre un immeuble à disposition gratuite d’un associé ne permet pas au gérant de prendre cette décision seul.

Une décision excédant les pouvoirs du gérant

La Cour de cassation confirme la décision rendue en appel, avec des précisions supplémentaires. Il apparaît que l’objet social de la SCI ne mentionnait pas expressément que les biens de la société pouvaient être mis gratuitement à disposition des associés. De fait, les juges considèrent que l’annulation du contrat de prêt à usage avec la SCI est légalement justifiée.

L’arrêt rendu le 2 mai 2024 marque une évolution de la position de la juridiction vers plus de sévérité dans l’interprétation de l’objet statutaire. Il convient donc de se montrer particulièrement vigilant au moment de définir le périmètre de l’objet social. La seule mention de l’acquisition, de la propriété, de l’administration et de l’exploitation de tous biens immobiliers ou mobiliers ne donne pas droit au gérant de vendre seul les actifs de la SCI. Effectivement, l’objet social doit décrire les activités exercées par la société de manière suffisamment précise. Il détermine l’étendue des pouvoirs du gérant, ce dernier ne pouvant agir que dans l’intérêt et la limite de l’objet social. S’il accomplit des actes qui ne sont pas prévus dans l’objet social, il engage sa responsabilité. Pour éviter toute mauvaise surprise, il est recommandé de faire appel à un professionnel pour se faire assister dans cette étape.