Dans une affaire récente, les juges ont rappelé qu’en l’absence de clause expresse, la vente d’un fonds de commerce n’implique pas la transmission à l’acheteur du passif des obligations dont le vendeur était tenu avant la cession ni des créances qu'il détenait.
Contestation d’un licenciement pour faute lourde
En l’espèce, il est question d’un salarié qui, contestant le licenciement pour faute lourde qui lui avait été notifié en 2012 par lettre recommandée avec avis de réception par sa société, a saisi le conseil des prud’hommes puis formé appel du jugement ayant refusé ses demandes.
Trois ans plus tard, la société avait vendu son fonds de commerce à une autre. Cette dernière, déclarant venir aux droits de l’employeur cédant, est intervenue volontairement devant la cour d’appel pour réclamer au salarié licencié des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par sa faute. La cour d’appel lui a donné raison en condamnant le salarié à réparer le préjudice causé par la faute lourde à l’origine de son licenciement.
Prétextant que la société n’était pas concernée par ce litige dès lors que l’acte de cession du fonds de commerce ne prévoyait pas la transmission des créances, le salarié a formé un pourvoi en cassation.
Une demande jugée irrecevable par la Cour de cassation
La Cour de cassation a jugé la contestation de licencement irrecevable au motif qu’aucune clause ne stipulait expressément la cession des obligations dont le vendeur pouvait être tenu en vertu des engagements initialement souscrits ou des créances détenues antérieurement à la cession. La clause contraire exigée doit être expresse et concise, l’efficacité d’une clause générale étant écartée par la chambre commerciale. Dès lors, la créance détenue par la société vendeuse sur son ancien salarié, à savoir les dommages-intérêts, ne pouvait être transmise à la société ayant acquis le fonds.
Dans un arrêt du 25 octobre 2023, les juges rappellent que sauf clause expresse ou exception légale, la cession d’un fonds de commerce n’emporte pas la transmission des obligations incombant au vendeur avant l’opération.
Cette décision montre l’importance accordée à la rédaction de l’acte de cession. Plusieurs éléments doivent y être mentionnés dont :
- les éléments incorporels et corporels du fonds repris,
- l’identité des parties,
- la date et la nature de l’acte,
- le prix de vente et les modalités de paiement,
- l’origine du fonds de commerce,
- le chiffre d’affaires et les résultats d’exploitation,
- les caractéristiques du bail commercial,
- l’état des nantissements grevant le fonds.
Si l’omission de ces informations n’entraîne pas la nullité du contrat de cession, leur présence favorise la transparence entre les parties.