En incluant et classant les secteurs du gaz et du nucléaire comme des activités économiques ayant un impact favorable sur l’environnement dans la taxonomie européenne, l’Europe a provoqué la colère des opposants. Il faut dire que cette décision est lourde de conséquences pour les banques qui obtiennent désormais un feu vert pour financer des énergies controversées aux yeux du grand public.
Labelliser le gaz et le nucléaire en tant qu’investissement vert
Après plusieurs semaines de débat, la Commission européenne a dévoilé, début février, son acte délégué qui règle le sort des deux énergies dans la liste continentale des investissements verts. Le gaz et le nucléaire seront bien inclus dans la taxonomie européenne sous conditions tout de même :
- Pour la construction de nouvelles centrales nucléaires, les projets devront avoir obtenu un permis de construire avant 2045.
- Pour les centrales au gaz qui obtiennent leur permis de construire avant 2030, un seuil de 270 grammes de CO2 par kilowattheure a été retenu.
Cette décision n’est pas sans conséquence pour les banques qui, ces derniers temps, étaient encouragées par les autorités à s’éloigner des énergies fossiles. La plupart des grands groupes bancaires français ont ainsi rejoint l’« alliance Net Zero », un groupe international d’investisseurs qui se sont engagés à assurer la transition de leur portefeuille d’investissements vers une neutralité carbone d’ici 2050. Par ailleurs, les banques ont également décidé de cesser de financer le charbon et de prendre des engagements de sortie des énergies fossiles non conventionnelles dont font partie le pétrole et le gaz de schiste.
La mesure annoncée par la Commission européenne risque de freiner les banques dans leur élan. Celles-ci disposent désormais d’un argument massue à opposer aux défenseurs de l’environnement qui souhaiteraient voir réduire les financements du gaz et du nucléaire.
Les écologistes et les ONG dénoncent du « greenwashing »
De leur côté, les ONG et les écologistes crient au « greenwashing » estimant que la taxonomie va « perdre sa crédibilité ».
Parmi elles, Greenpeace affirme dans un communiqué de presse du 2 février 2022 « Taxonomie : l’inclusion du nucléaire et du gaz est un hold-up sur la transition énergétique européenne » que « cette décision risque de freiner dangereusement la transition énergétique européenne en détournant des centaines de milliards d’euros de financements privés et publics vers des énergies climaticides et polluantes ».
Reclaim Finance, fondée en 2020 avec pour objectif de mettre la finance au service du climat, considère que la taxonomie devient « un standard de greenwashing » et appelle les acteurs financiers à mettre en place un standard d’exclusion du gaz et du nucléaire qui soit plus sévère que la taxonomie.
NEW: The #EUTaxonomy compromised by gas and nuclear 🏭☢️
— Reclaim Finance (@ReclaimFinance) February 2, 2022
Following intense industry lobbying supported by a pro-gas and nuclear alliance of countries, the @EU_Commission has included fossil gas and nuclear power in the 🇪🇺 ‘sustainable’ taxonomy. pic.twitter.com/KZN6wbQyRy
Pour la Commission européenne, pas question de diaboliser le gaz ou le nucléaire ou d’en détourner les fonds privés qui vise à drainer la taxonomie. L’institution rappelle que le développement des énergies renouvelables reste la priorité, mais que celles-ci ne pourront pas à elles seules répondre à la demande croissante d’électricité. Cela explique que le gaz et le nucléaire soient classés dans la taxonomie dans une sous-catégorie d’énergie transitoire dotée de garde-fous.